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Vente d’un bien immobilier dans le cadre d’une liquidation judiciaire : exclusion du droit de préférence du locataire titulaire d’un bail commercial
La loi Pinel du 18 juin 2014 a introduit l’article L. 145-46-1 au sein du Code de commerce. Ce texte offre un droit de préférence au locataire installé dans un local à usage commercial ou artisanal.
La loi Pinel du 18 juin 2014 a introduit l’article L. 145-46-1 au sein du Code de commerce. Ce texte offre un droit de préférence au locataire installé dans un local à usage commercial ou artisanal.
En effet, lorsque le propriétaire du local envisage de le vendre, il est obligé d’en informer son locataire par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou remise en main propre contre récépissé ou émargement. Cette notification de la volonté de vendre doit mentionner le prix et les conditions de la vente envisagée sous peine de nullité. Elle équivaut à une offre de vente au profit du locataire. Ce dernier dispose alors d’un délai d’un mois à compter de la réception de l’offre pour se prononcer. S’il accepte, le locataire a deux mois, à compter de la date d’envoi de sa réponse au propriétaire pour réaliser la vente. S’il recourt à un prêt pour financer son acquisition, l’acceptation de l’offre est subordonnée à l’obtention de ce prêt et le délai pour réaliser la vente est de quatre mois.
Depuis l’introduction de ce texte dans le Code de commerce, la référence à la volonté du bailleur de vendre son bien est discutée. La question se pose notamment de savoir si en cas de vente du bien loué à l’occasion d’une procédure de liquidation judiciaire, le bailleur a bien la volonté de vendre. Dans l’affirmative, cela veut dire qu’une telle vente donne lieu à l’application de l’article L. 145-46-1 du Code de commerce : le locataire dispose d’un droit de préférence. Dans la négative, l’application du texte est exclue : le locataire n’a pas de droit de préférence.
Les juges se sont prononcés sur cette question à plusieurs reprises. Ainsi, dans une décision rendue le 23 mars 2022, la Cour de cassation a décidé d’exclure l’application de l’article L. 145-46-1 du Code de commerce lorsque la vente intervient dans le cadre d’une liquidation judiciaire. La raison est simple : la vente réalisée dans le cadre d’une liquidation judiciaire est une vente faite d’autorité de justice. Cette vente ne résulte pas de la volonté du propriétaire du local mais intervient à l’initiative d’un tiers. Elle est organisée par le juge-commissaire, dans le cadre de la liquidation judiciaire dont le propriétaire fait l’objet.
L’exclusion de l’article L. 145-46-1 du Code de commerce a été réaffirmée récemment, dans une décision rendue par la Cour de cassation le 15 février 2023.
Dans cette affaire, le propriétaire du local était une SCI qui avait été placée en liquidation judiciaire. Dans le cadre de cette procédure, le juge-commissaire avait organisé la vente du local loué à une communauté de communes. Le locataire, estimant que son droit de préférence avait été méconnu a demandé à être substitué à l’acquéreur.
Toutefois, la Cour de cassation a rejeté se demande au motif que l’article L. 145-46-1 du Code de commerce n’était pas applicable dans cette situation. Les juges rappellent que la vente d’un actif immobilier dans le cadre d’une liquidation judiciaire est une vente faite d’autorité de justice, à l’initiative d’un tiers. Par conséquent, les juges en déduisent que les dispositions de l'article L. 145-46-1 du même code, qui concernent le cas où le propriétaire d'un local commercial ou artisanal envisage lui-même de le vendre, ne sont pas applicables, de sorte qu'une telle vente ne peut donner lieu à l'exercice du droit de préférence par un locataire commercial.
En définitive, voici ce qu’il faut retenir de ces décisions : à partir du moment où la vente du local à usage commercial ou artisanal ne résulte pas de la volonté du propriétaire mais est réalisée à l’initiative d’un tiers, le locataire ne bénéficie pas d’un droit de préemption. C’est notamment le cas lorsque la vente intervient au cours d’une procédure de liquidation judiciaire, lorsque la vente résulte d’une adjudication judicaire ou lorsqu’il s’agit d’une vente forcée à la suite d’une saisie.