Actualités
Publié le
Vente de locaux à usage exclusif de bureaux et droit de préférence du locataire
Depuis la loi Pinel de 2014, l’article L. 145-46-1 du Code de commerce offre au locataire d’un local à usage commercial ou artisanal un droit de préférence, aussi appelé droit de préemption. Cela signifie que lorsque le propriétaire du local loué décide de le vendre, il doit, en priorité, proposer au locataire de l’acheter. Le propriétaire doit informer le locataire par lettre recommandée avec accusé de réception ou par un courrier remis en main propre contre signature. Ce document doit mentionner le prix et les conditions de la vente envisagée. Une fois reçu, le locataire dispose d’un délai d’un mois pour répondre au propriétaire. En cas d’acceptation, il a deux mois à compter de la date d’envoi de sa réponse pour réaliser la vente et quatre mois s’il recourt à un prêt.
Cette règle est d’ordre public : les parties au contrat de bail commercial ne peuvent pas l’écarter lors de sa conclusion. Il existe cependant des exceptions prévues par le Code de commerce : le droit de préemption ne s’applique pas en cas de cession de plusieurs locaux d’un ensemble commercial, de cession de locaux commerciaux distincts ou de cession d'un local commercial au copropriétaire d'un ensemble commercial. Il n'est pas non plus applicable à la cession d'un immeuble comprenant des locaux commerciaux ou à la cession d'un local au conjoint du bailleur, ou à un ascendant ou un descendant du bailleur ou de son conjoint.
La question s’est cependant posée de savoir si cet avantage pouvait bénéficier au locataire de bureaux, car le Code de commerce ne mentionne que les locaux à usage commercial ou artisanal. La Cour d’appel de Paris a répondu à cette question dans une décision rendue le 1er décembre 2021.
Une promesse de vente de locaux et de deux places de parking sous condition suspensive a été conclue entre le propriétaire et un potentiel acquéreur. Le locataire des locaux et des places de parking ayant cependant fait part de son intention d’utiliser son droit de préférence prévu par le Code de commerce, c’est avec lui que le propriétaire a conclu la vente.
Déçu, le bénéficiaire de la promesse, qui se voyait déjà acquéreur, a demandé la nullité de la vente conclue entre le propriétaire et le locataire : il souhaite qu’elle soit conclue à son profit et également obtenir une indemnisation de son préjudice. Il considère que l’article L. 145-46-1 du Code de commerce n’est pas applicable aux locaux à usage exclusif de bureaux, ce qui était le cas du locataire. Celui-ci exerçait en effet une activité d’administration de biens, syndic de copropriété et location de biens immobiliers. Le bénéficiaire de la promesse estime qu’il n’avait donc pas de droit de préférence.
Les juges de la Cour d’appel de de Paris ont donné raison au locataire. Ils considèrent que l’article L. 145-46-1 du Code de commerce est ambigu, car les locaux à usage de bureaux ne sont ni inclus expressément, ni exclus expressément de son champ d’application. Ils ajoutent que l’activité d’administrateurs de biens, syndic de copropriété, location, transaction est bien une activité commerciale. Les locaux loués au locataire étaient donc bien affectés à un usage commercial, comme l’exige l’article L. 145-46-1. Par conséquent, le locataire bénéficiait bien d’un droit de préemption et avait le droit de l’invoquer pour acquérir les locaux et les places de parkings loués.
Pour conclure, ce qu’il faut retenir de cette décision est que le preneur de locaux à usage exclusif de bureaux bénéficie a priori du droit de préférence prévu par l’article L. 145-46-1 du Code de commerce si l’activité exercée dans les locaux est commerciale.